Avant le quart de finale retour de Champions League entre Aston Villa et le PSG, l'analyste vidéo Victor Lefaucheux est revenu sur la victoire 3-1 du PSG à l'aller et sur la bataille tactique entre Luis Enrique et Unai Emery. Un long article d'analyse éclairant avant le retour dont nous vous proposons un extrait ci-dessous.
Conservant sa capacité de manipulation avec ballon, le PSG n’a fait sauter qu’à la 94e le verrou de Villa sur attaque placée. Non sans avoir largement trituré le 6-2-2 – volontaire - d’Emery. Sans ballon, Paris a modifié son approche face au carré asymétrique caractéristique du Basque. Alors qu’ils ont déjà procédé à quelques ajustements pendant le match, avec et sans le cuir, les Villans – pas loin de revenir avec un très bon résultat - savent certainement ce qu’ils ont à faire au retour.


Le modèle défensif d’Emery : un 6-2-2 assumé et nécessaire
On en avait eu un aperçu au PSG – et c’était d’ailleurs le centre de la discorde avec Thiago Silva – Unai Emery, sur le plan défensif, d’un point de vue modèle (et non ajustements) poursuit l’idéal d’un bloc compact, court, et très zonal, avec un gout prononcé pour le piège du hors-jeu.
Le match aller de Bernabeu 2018, comme la finale de Coupe de la Ligue 2017 (où l’alignement parisien avait écœuré Mbappe…) furent des illustrations explicites de ce parti pris défensif, caractéristique du coach basque.

Isco est géré zonalement entre lignes. CR7 attaque la profondeur, mais l’alignement – à cette époque et dans ce contexte – suffit à Emery et au PSG
Lors de ce déplacement à Madrid, si certains joueurs faisaient l’objet d’une attention particulière, aucun ne poussait le bloc parisien à particulièrement se déformer pour rester à leur contact.
On le voit ci-dessous, deux milieux madrilènes qui se projettent (Isco et Modric) sont « récupérés » par deux défenseurs. En continuant son appel, Modric finit par être hors-jeu. Emery ne mobilise alors que ses 4 défenseurs pour récupérer ces courses.

Dans la jungle positionnelle de PL, face aux Guardiola, Slot et autres Arteta, Emery a légèrement renoncé à cet idéal de structure, et a clairement choisi d’injecter une dimension « marquage individuel » dans sa zone.
Tout en gardant un bloc très compact verticalement. Ainsi, la gestion du halfspace ne peut plus incomber uniquement au central côté ballon (comme c’était le cas de Marqui ci-dessus face à Isco) qui viendrait « récupérer » le (ou les !) joueur qui s’y projetterait.
Plutôt, elle incombe aux milieux défensifs et aux ailiers de Villa (c’est-à-dire toute la ligne du milieu), qui peuvent être amenés à suivre (dans une certaine mesure, qui est donc l’alignement de ce back6) les éventuels « projeteurs » adverses.
Par conséquent – et on le voit très nettement dans la partie consacrée à l’animation offensive d’Arsenal, face à Villa dans cet article – les Claret and Blue s’organisent très souvent, de fait, en 6-2-2. Via les Kamara, McGinn et autres Onana qui rentrent dans la ligne défensive, alors que les latéraux vont chasser au large.

Kamara #44 (MCD), Rogers #27 (MLD), et Onana #24 (MCG) entrent dans cet alignement rugbystique. Les Gunners doivent s’employer pour battre ce 6-2-2 – mix d’alignement et de marquages – qu’Emery s’estime certainement contraint à déployer en PL
Face à des latéraux entreprenants, on voit donc souvent les ailiers entrer dans cette ligne à 6.

Rogers, ailier droit, est préposé à suivre le Gunner qui attaque le halfspace, tout s’alignant, ce qui n’est pas loin d’être payé cash ici
La subtilité – voire le contre-sens – sur laquelle Paris devait donc appuyer (et n’a pas manqué de le faire) : Ces 6 éléments doivent quand même se coordonner sur un alignement qui doit, c’est l’idée, mettre hors-jeu les offensifs adverses qui se projetteraient.
Bloqués qu’ils seraient par cette organisation à la fois compacte et agressive, au moment de demander dans les pieds entre les lignes.

A son back-4 structuré et aligné, Emery ajoute deux « joueurs résine » qui bouchent les trous, et pourchassent les adversaires qui se projettent. Ici Kamara (MCD) et Ramsey (MLG) entre dans le back6.
L’alignement fut bien évidemment un enjeu fondamental dans la tournure des évènements de ce match aller.
Selon lequel le score aurait pu aller de 1-1 à 4-1, pour de petits détails.
Ainsi, les match-ups théoriques étaient, ou pouvaient être, les suivants :

Exemple de 6-2-2, avec à la fois la prérogative de monter la ligne (jouer le hors-jeu, vers l’avant) et de prendre en charge individuellement les éléments créatifs ou verticaux (les traquer, vers l’arrière) dans les intervalles, qui pourraient attaquer les halfspaces de Villa
Le PSG surcharge les halfspaces en 3-1-6, et se déforme constamment
On avait vu dans cet article que si le « 5 extérieur » du PSG avait pour mission d’étirer le bloc, le « 5 intérieur » avait quant à lui des prérogatives plus resserrées, voire volontairement entassées pour combiner.
Comme c’était le cas face à Liverpool au Parc, Paris va donc, via ce mécanisme, surcharger les halfspaces, tout en s’appliquant à injecter un maximum de permutations, pour ne pas donner de repère trop fiables aux Villans.
On le voit ci-dessous avec les positions moyennes de Paris : le 14 de Doué est carrément plus axial que le 10 de Dembélé.
Entre les déplacements de son faux-neuf et de son ailier droit, Paris a surchargé différentes zones, avec toujours le même objectif : trouver un élément libre face au jeu, pour délivrer la passe en profondeur fatale, et vaincre cet alignement, forcément plus compliqué à coordonner à 6 qu’à 4.

Le 14 de Doué et le 10 de Dembélé surchargent le halfspace droit, alors qu’Hakimi se tient très haut au large. Il y a aussi quelque chose à remarquer du côté de Villa…
A droite, le PSG va vite installer la confusion en faisant en sorte de mobiliser Digne (vers l’avant) avec Doué, tout en mobilisant Rogers (MLG) vers l’arrière via Hakimi, dont on sait que la menace verticale n’est pas factice.
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